Interactions médicamenteuses : comment la fumée du tabac modifie le système du cytochrome P450
Le tabagisme peut affecter l’effet des médicaments et de la caféine
Il est possible que le patient souffre d’affections qui requièrent la prise de certains médicaments dont l’effet pourrait être affecté par le tabagisme du patient. Lorsque vous aidez un patient à cesser de fumer, assurez-vous de réévaluer le dosage de sa médication et de le modifier au besoin.
Le tabagisme affecte même la réaction de l’organisme à la caféine.
Il peut arriver que les personnes qui fument ressentent des symptômes de toxicité, comme l’insomnie ou la nervosité, lorsqu’elles essaient d’arrêter de fumer tout en continuant à consommer la même quantité de caféine que d’habitude (café, thé, cola, etc.)1,2.
Voilà pourquoi la consommation de caféine doit être réduite de moitié en prévision de la date d’abandon, afin de réduire le risque d’effets secondaires2,3,4.
Le saviez-vous?
La fumée de tabac affecte le métabolisme d’un grand nombre de médicaments dans le foie
Lorsque les patients arrêtent de fumer, le changement dans la quantité de fumée de tabac à laquelle ils sont exposés peut modifier la concentration des médicaments qu’ils prennent et la réponse de leur organisme à ces médicaments.
En réalité, il a été démontré que les hydrocarbures aromatiques polycycliques (HAP) – substances chimiques présentes dans la quantité de fumée de tabac – induisent plusieurs enzymes hépatiques, dont le cytochrome P450. Pour les personnes qui fument, cela se traduit par un métabolisme plus rapide des médicaments par le cytochrome P450 qui peut, à son tour, entraîner une réduction cliniquement significative des concentrations de certains médicaments et de leurs effets pharmacologiques2.
Une simple consommation de 7 à 12 cigarettes par jour a eu des effets cliniquement importants sur le métabolisme des médicaments6. Il importe toutefois de savoir que ces effets étaient dus non pas à la nicotine, mais plutôt aux HAP2,3,4. En réalité, les symptômes qui surviennent durant l’abandon tabagique sont dus aux interactions avec les médicaments et non à la thérapie de remplacement de la nicotine ou au sevrage de la nicotine.
Avec l’arrêt du tabagisme, l’activité du cytochrome P450 commence à revenir à la normale, ce qui a pour résultat de ralentir le métabolisme des médicaments2, et, par conséquent, entraîner un risque d’intoxication médicamenteuse et d’effets indésirables4.
Le risque d’intoxication médicamenteuse à l’arrêt du tabagisme est variable et peut être dû à plusieurs facteurs, liés aussi bien au patient qu’au médicament en question. Le médicament, le nombre de cigarettes fumées chaque jour ainsi que d’autres facteurs peuvent influer sur la durée et l’ampleur de l’interaction.
Demander : Est-ce que vous prenez des médicaments, qu’ils soient prescrits par votre médecin ou offerts en vente libre?
Conseiller : Lorsque vous diminuez votre consommation de tabac ou cessez de fumer, les concentrations de médicaments dans votre organisme peuvent changer.
Agir : Envisagez un ajustement de la posologie ou une surveillance accrue des effets indésirables médicamenteux lorsque la consommation de tabac change.
Interactions médicamenteuses avec la fumée du tabac
Constatez les effets possibles de la fumée de cigarette – et de l’abandon du tabac – sur ces médicaments.
Téléchargez ici la liste complète des médicaments et des mesures recommandées :
Nouveau guide canadien : Interactions médicamenteuses avec la fumée du tabac
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Bêtabloquants : L’augmentation de la clairance peut entraîner une baisse des taux sériques Les interactions pharmacodynamiques peuvent diminuer l'efficacité des antihypertenseurs et la maîtrise de la fréquence cardiaque3,5.
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Clopidogrel : L'induction enzymatique liée au tabagisme peut augmenter la transformation du clopidogrel en son métabolite actif. L’effet du clopidogrel est potentialisé chez les personnes fumant 10 cigarettes ou plus par jour4,5.
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Flécaïnide : Le tabagisme augmente la clairance. Les fumeurs peuvent avoir besoin de posologies plus élevées5.
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Héparine : Les fumeurs peuvent avoir besoin de posologies plus élevées. L’abandon tabagique peut accroître le temps de Quick et ainsi augmenter le risque de saignement3-5.
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Mexilétine : Le tabagisme peut augmenter la clairance. L’abandon tabagique peut accroître les taux3,5.
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Pirfénidone : Le tabagisme accroît le métabolisme. La diminution de l'exposition chez les fumeurs peut modifier le profil d'efficacité5.
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Propranolol : Le tabagisme augmente la clairance. Les taux sériques (et les effets du propranolol) peuvent augmenter après l’abandon tabagique5.
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Riociguat : Le tabagisme peut réduire l’exposition au riociguat. L’abandon tabagique peut accroître les taux7.
- Warfarine : Le tabagisme peut diminuer les taux sériques de warfarine. Il est recommandé de surveiller le RIN dès l’abandon du tabac4,5,8.
- Insuline (voie sous-cutanée) : Les fumeurs peuvent présenter une insulinorésistance accrue et avoir besoin de doses plus élevées. L’abandon tabagique peut diminuer l’insulinorésistance3-5.
- Quinine : Le tabagisme augmente la clairance. L’abandon tabagique peut accroître les taux plasmatiques9.
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Ropinirole : Le tabagisme peut accroître le métabolisme. L’abandon tabagique peut accroître les taux5.
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Tacrine : Le tabagisme peut accroître le métabolisme. Les fumeurs peuvent avoir besoin de posologies plus élevées. L’abandon tabagique peut accroître les taux10.
- Tizanidine : Les hommes qui fument peuvent présenter des taux sanguins plus faibles. L’abandon tabagique peut accroître les taux plasmatiques5.
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Bendamustine : Le tabagisme peut diminuer les concentrations de bendamustine, tout en augmentant celles de ses deux métabolites actifs. L’abandon tabagique peut entraîner une variation de la concentration de la bendamustine et de ses métabolites actifs5.
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Erlotinib : Le tabagisme augmente la clairance. Les fumeurs peuvent avoir besoin de doses plus élevées. L’abandon tabagique peut accroître les taux5,11.
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Irinotécan : Le tabagisme peut réduire l'exposition générale et l'efficacité. L’abandon tabagique peut accroître les taux; cependant, les doses ne sont généralement pas adaptées chez les fumeurs5.
- Nintédanib : Le tabagisme diminue l’exposition. L’abandon tabagique peut accroître les taux; cependant, les doses ne sont généralement pas adaptées chez les fumeurs5.
- Opioïdes : Le tabagisme peut accroître le métabolisme de certains opioïdes. Le tabagisme peut diminuer l’effet analgésique des opioïdes. Après l’abandon tabagique, la maîtrise adéquate de la douleur peut être obtenue avec des doses d’opioïdes plus faibles8.
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Chlorpromazine : Le tabagisme peut abaisser les taux sériques. L’abandon tabagique peut accroître les taux. Il pourrait être nécessaire de réduire la posologie4,5.
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Clozapine : Le tabagisme peut accroître le métabolisme et abaisser les taux sériques. L’abandon tabagique peut accroître les taux. Il peut être nécessaire de réduire la dose de 50 % (en moyenne)3-5.
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Duloxétine : Le tabagisme peut abaisser les taux plasmatiques. L’abandon tabagique peut accroître les taux3.
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Fluphénazine : Le tabagisme peut abaisser les taux plasmatiques. L’abandon tabagique peut accroître les taux3.
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Fluvoxamine : Le tabagisme peut abaisser les taux plasmatiques. L’abandon tabagique peut accroître les taux. Il peut être nécessaire de diminuer la posologie3-5.
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Halopéridol : Le tabagisme peut abaisser les taux plasmatiques. Les fumeurs peuvent avoir besoin de posologies plus élevées3,5.
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Lithium : Le tabagisme augmente la clairance de la caféine, ce qui affecte indirectement les taux de lithium. L’abandon tabagique pourrait modifier indirectement l’excrétion du lithium, même sans réduction de la consommation de caféine3.
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Mirtazépine : Le tabagisme diminue les taux. L’abandon tabagique peut accroître les taux3.
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Olanzapine : Le tabagisme accroît le métabolisme et la clairance. En général, des modifications posologiques ne sont pas recommandées, mais les fumeurs peuvent avoir besoin de posologies plus élevées3,5.
- Antidépresseurs tricycliques : Le tabagisme peut diminuer les taux sanguins. L’abandon tabagique peut augmenter les taux sériques5.
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Benzodiazépines : La stimulation par la nicotine peut réduire les effets sédatifs. Le métabolisme accru peut abaisser les taux sériques3-5.
- Zolpidem : Le tabagisme peut diminuer les taux plasmatiques et diminuer l’effet hypnotique. Les gros fumeurs peuvent avoir besoin de posologies plus élevées. L’abandon tabagique peut accroître les taux plasmatiques3.
- Caféine : Le tabagisme augmente d’environ 50 % la clairance de la caféine. L’abandon tabagique peut accroître les taux3-5.
Savoir quels médicaments interagissent avec la fumée de tabac peut aider à modifier les doses, assurer un suivi et déterminer le statut tabagique.
InterACTIONS médicamenteuses avec la fumée du tabac : Conversation informelle avec le Dr Andrew Pipe et Ron Pohar (en anglais seulement)
Retrouvez le Dr Andrew Pipe et le pharmacien Ron Pohar, deux éminents experts au Canada en matière d’abandon tabagique, pour une conversation sur le nouvel outil « Interactions médicamenteuses avec la fumée du tabac » et la façon de s’en servir pour aider vos patients dans leur cheminement vers une vie sans tabac.